SAAQclic : chronique d’un fiasco numérique au Québec
Une réforme numérique attendue… et ratée
En février 2023, la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) lançait fièrement sa nouvelle plateforme numérique : SAAQclic. Ce portail devait permettre aux citoyens de réaliser en ligne plusieurs services auparavant disponibles uniquement en succursale — comme le renouvellement de permis de conduire, l’immatriculation de véhicules ou le paiement de droits.
Promettant efficacité, rapidité et modernité, SAAQclic s’inscrivait dans la tendance de la transformation numérique du gouvernement québécois. Or, dès son lancement, la plateforme a connu un démarrage catastrophique.
Pannes, files d’attente et citoyens en colère
Dès les premiers jours, le système a été paralysé par une combinaison de pannes informatiques, de problèmes de connexion, de bugs techniques et d’une incapacité à gérer un fort achalandage. Résultat : des milliers de Québécois ont dû attendre pendant des heures — en ligne comme en personne — pour effectuer des démarches simples.
Les images de files d’attente interminables devant les succursales de la SAAQ ont envahi les médias et les réseaux sociaux. Des citoyens frustrés ont dénoncé des services inaccessibles, des délais abusifs et une absence de soutien téléphonique.
Des enjeux mal anticipés
Le problème ne venait pas uniquement de la plateforme, mais aussi de la façon dont la transition numérique a été gérée :
Système trop complexe : SAAQclic exigeait une connexion via le service d’authentification gouvernemental clicSÉQUR, que de nombreux usagers trouvaient difficile à comprendre ou à activer.
Formation inadéquate du personnel : Les employés de la SAAQ n’avaient pas tous été formés à l’utilisation du nouveau système avant son lancement.
Manque de tests à grande échelle : La plateforme n’a pas été suffisamment testée en conditions réelles, ce qui a aggravé les problèmes dès son ouverture.
Réactions politiques et excuses officielles
Face à l’ampleur du chaos, le ministre des Transports François Bonnardel a dû intervenir publiquement. Il a présenté des excuses aux citoyens et admis que la mise en service de SAAQclic avait été mal planifiée. Il a qualifié la situation de “fiasco” et a promis des mesures correctives.
Des voix dans l’opposition ont réclamé des enquêtes, évoquant un échec de gouvernance dans la gestion des projets numériques de l’État québécois. Certains ont comparé le cas à d’autres ratés technologiques gouvernementaux comme le lancement de Dossier Santé Québec ou les retards dans les systèmes de paie.
Conséquences durables
Crise de confiance : L’échec de SAAQclic a ébranlé la confiance des citoyens dans les services numériques du gouvernement.
Surcoûts : Le projet initialement budgété à plusieurs dizaines de millions de dollars pourrait coûter bien plus cher une fois les correctifs apportés.
Impact sur les employés : Le stress causé par le manque de formation et les tensions avec les usagers a eu un effet direct sur le personnel de la SAAQ.
Où en est-on maintenant ?
Depuis le printemps 2023, la situation s’est stabilisée progressivement grâce à des mises à jour, un soutien accru en succursale et une meilleure communication. La plateforme SAAQclic est désormais fonctionnelle, mais l’événement reste un exemple emblématique d’un virage numérique mal exécuté.
Conclusion
Le fiasco de SAAQclic a mis en lumière les défis réels de la numérisation des services publics : absence de tests rigoureux, transition trop rapide, mauvaise communication et manque de formation. Il rappelle l’importance d’un accompagnement humain dans toute réforme numérique et d’une gestion plus rigoureuse des projets technologiques de l’État.